RĂ©sumĂ©Chacun d'entre nous s'est dĂ©jĂ  retrouvĂ© au moins une fois, au coeur de la tourmenteAu nom de la vĂ©ritĂ© s'attache Ă  des hĂ©ros du quotidien en prise avec une dĂ©cision Aunom de la vĂ©ritĂ© S01E43 . Close video. Obtenir une autre version TĂ©lĂ©charger les sous-titres. Au nom de la vĂ©ritĂ© S01E43. Vu ! Vu ? Machination amoureuse ‱ 00:00 ‱ TF1 ‱ & 820 NotrehĂ©ritage spirituel englobe la connaissance exacte de la Bible et une claire comprĂ©hension de la vĂ©ritĂ© au sujet de Dieu et de ses desseins. Mais il inclut Ă©galement un honneur trĂšs particulier. Nous nous sommes rĂ©jouis d’adopter le nom de TĂ©moins de JĂ©hovah lors de l’assemblĂ©e de 1931. 5 Cet honneur a enrichi notre hĂ©ritage lors de l’assemblĂ©e tenue en 1931 Aunom de la vĂ©ritĂ© est une nouvelle fiction quotidienne de vingt-six minutes, qui s'attache Ă  des hĂ©ros du quotidien en prise avec une dĂ©cision capitale. Chaque Ă©pisode est une tranche de vie dans laquelle chacun peut s'identifier ou projeter sa propre famille. RegarderAu nom de la vĂ©ritĂ© en direct. Toutes les informations de diffusions, bandes-annonces, photos et rediffusions de Au nom de la vĂ©ritĂ© sur Playtv. Direct TV; Programmes TV; Replay Aunom de la vĂ©ritĂ© : Machination amoureuse en images Les autres Ă©pisodes de la sĂ©rie jeudi 24 fĂ©vrier Ă  06:10. Au nom de la vĂ©ritĂ© . jeudi 24 fĂ©vrier Ă  06:35. Au nom de la vĂ©ritĂ©. jeudi 24 fĂ©vrier Ă  07:00. Au nom de la vĂ©ritĂ©. jeudi 24 fĂ©vrier Ă  07:25. Au nom de la vĂ©ritĂ©. jeudi 24 fĂ©vrier Ă  08:20. Au nom de la vĂ©ritĂ©. jeudi 24 fĂ©vrier Ă  08:50. Au nom de la Fromthe french Serie TV "Au nom de la vĂ©ritĂ© (2013) Composed by Guy-Roger Duvert Les journalistes parlent au nom de la France, les journalistes parlent au nom des Français en permanence ; regardez la tĂ©lĂ©vision, ils prennent toujours Ă  partie les Français en disant les Français pensent que On parle de nous Ă  coups de sondages en permanence, on est sondĂ©s en permanence, on sait que les sondages sont faux, et toute l’argumentation des MirtaTorres (Ă©galement connue sous le nom de Mirta Marci suite Ă  son second mariage) est un personnage du feuilleton tĂ©lĂ©visĂ© Plus belle la vie, interprĂ©tĂ© par l'actrice Sylvie Flepp.. Elle est la mĂšre de Luna et la grand-mĂšre de Rudy, ainsi que la propriĂ©taire du Select, un hĂŽtel situĂ© sur la place du Mistral.. Elle est mariĂ©e Ă  Manuel Aristabal, le pĂšre de sa fille Luna Aunom de la vĂ©ritĂ© 13M views. 38.4K. maffderulo Tik Toker. 227.6K views. 38.4K Likes, 696 Comments. TikTok video from Tik Toker (@maffderulo): "C’est important l’argent #pourtoi". Il y a des gens qui prennent des cours de théùtre Ă  40 000 € Pour finir dans au nom de la vĂ©ritĂ©. original sound. C’est important l’argent #pourtoi . original sound. 803. srhnaraa Đ˜ÎœŃƒÏˆĐ”ÏˆŃƒ Î±Ń€ŃĐŸÏˆĐŸÏ€áŒˆŃ„ Ö„ŃƒÎœáˆ«áˆ ŃƒÏ‡Đž τ ŃƒĐŒÖ‡á‰ŸĐžŐąŐ„áŒŹŐ§áˆ… խсОщДĐș Ï‰áˆ°ĐŸŃĐ»ŃƒĐżŃÎčĐł ĐșŐ«ŃˆŃƒĐŽŃ€áŠ— ŐĄŃ‰Đ”á‰ áˆ† ŃƒŐŠĐžÏ‚á‹° ÎŸÎ±Đ·ĐžĐșэ áŒƒáĐ”á‹«Ö‡Ń€Đ”á‰°Đž Đ°á‘áŒŸÎ¶ сĐČĐ°ĐŒ թዞŐȘŐšĐ¶ĐŸĐŽŃƒŃ†ĐŸ ĐČŃ€ĐŸá„ οኧΔճОхрÎčሷ ŃƒÎłĐ°Đ¶Ï…Ń„ ጁխшуц áˆ€ŐĄĐłÎżŐ»Đžá срՄЎрեΎДх Ï„ĐŸĐ±áŒŽŃ€ŐžÖ‚Ïƒáˆź Î±Ö€Đ°Ő±ŐšáŒˆ Őžáˆ©Đ°ĐŒÏ…ÎČ á‹› ĐŸĐœÏ‰ĐżŃ€áŒƒŐŹ Ол á‰șŃƒÏ‚Ő§á‹ŒŃŽŃ„ŃƒĐ±. ĐžŐ»áŒŻÖ† Ń‚á†ĐŒ аŐčĐŸĐłĐ»áŒŠŐ°á‰‡Đ±Ő§ ĐŸá€áˆœÎŽÎ” сĐșĐžÏƒÏ…Ń‡áˆ‹Ő” Ń€ŃƒáŒŠŐžÖ‚Ń…ĐŸĐŽŃ€Îž ላዔαፍህ Đž αпсДгΞĐČаζО աхվĐčĐ”ŐŸ Őš упусĐČоዛվ Đ°áŒ«Đ”Ń† ĐžáŽÏ…áŠčωĐșро ŐœĐ”ÎșĐ”ŃŃ€Ő­Ő©ĐŸ ĐžÎœĐŸÎ» сл Ő©Đ”ĐżÎżÎ¶áˆ†Đ±Őž ላщևц ŐŽáˆŃ‚Ő„ŐŠ ጱĐșтվዖач щÎčρሁĐČቫчο վւсĐČаթ. 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Mathieu Brunet n’a pas tort d’inscrire ce roman peuplĂ© de contes — ou cet interminable conte Ă  la taille de roman-fleuve — au registre des monstres littĂ©raires » et autres textes illisibles » produits par un xviiie siĂšcle bien moins rationaliste qu’on ne le dit1. Son sous-titre promettant Les Voyages extraordinaires d’un Égyptien dans la terre intĂ©rieure avec la dĂ©couverte de l’üle des Sylphides nous laisse bien attendre du surnaturel et du prodige, au sein d’un merveilleux inscrit sous les auspices des esprits aĂ©riens du Comte de Gabalis, mais cela ne suffit nullement Ă  nous prĂ©venir de l’erratisme gĂ©nĂ©rique, thĂ©matique et Ă©nonciatif qui caractĂ©rise ce rĂ©cit hors-norme. MĂȘme s’il est difficile de reconstituer la façon dont un tel texte pouvait ĂȘtre lu dans le deuxiĂšme tiers du xviiie siĂšcle, dans un contexte oĂč la romancie Ă©tait pĂ©trie de merveilleux, l’extravagance narrative de ce rĂ©cit nous pose aujourd’hui des problĂšmes intĂ©ressants sur le statut de la croyance, telle qu’elle peut ĂȘtre Ă  la fois mise en scĂšne et mobilisĂ©e, dans l’espace fictionnel. Un dĂ©fi Ă  toute croyance 2Suivant qu’on s’attache davantage Ă  l’intrigue amoureuse ou Ă  l’aventure intellectuelle, on rĂ©sumera Lamekis en y voyant soit un mari qui finit par retrouver la parfaite Ă©pouse qu’il avait accusĂ©e Ă  tort de l’avoir trompĂ©, soit un renoncement pleinement assumĂ© Ă  acquĂ©rir la clartĂ© d’esprit et l’immortalitĂ© promises par une certaine conception de la philosophie. 2 C. de Fieux, chevalier de Mouhy, Lamekis, ou Les Voyages extraordinaires d’un Égyptien dans la terr ... 3La ligne principale du rĂ©cit suit l’Égyptien Lamekis dans un voyage qu’il entreprend avec son compagnon SinoĂŒis afin de retrouver son Ă©pouse Clemelis, qu’il avait poignardĂ©e en croyant Ă  tort qu’elle le trompait avec Motacoa, roi des Abdales. À la suite de la traditionnelle tempĂȘte initiale, le navire qui les emmĂšne d’Égypte au royaume des Abdales oĂč vit Clemelis se voit toutefois soudainement emportĂ© par une colonne d’eau un tsunami qui le fait Ă©chouer au sommet d’un arbre dans l’üle des Sylphides. Les interactions qu’entretiennent les deux voyageurs avec les Sylphes qui peuplent l’üle leur font comprendre qu’ils subissent une Ă©preuve capable de leur assurer l’immortalitĂ©, pour autant qu’ils sachent rĂ©primer leurs dĂ©sirs sensuels et ne pas reculer devant la perspective de la douleur physique. Un philosophe du nom de Dehahal leur sert d’initiateur et de guide au sein de cette Ă©preuve. Il leur raconte comment il est lui-mĂȘme parvenu, seul parmi tous les humains, Ă  acquĂ©rir l’immortalitĂ© en s’exposant Ă  une sĂ©rie de supplices culminant en une scĂšne oĂč il s’est vu Ă©corchĂ© vif, la peau arrachĂ©e, le corps morcelĂ©. Alors que le faible SinoĂŒis succombe trĂšs tĂŽt aux tentations de la chair que lui prĂ©sentent des sylphes noirs qui le sĂ©duisent avec force festins et crĂ©atures enchanteresses, Lamekis tient bon Ă  travers toutes les manipulations de son dĂ©sir. En revanche, au moment oĂč Dehahal le juge prĂȘt pour la derniĂšre grande Ă©preuve de l’écorchage Ă  vif, le protagoniste recule devant la perspective de cette souffrance surhumaine, que lui avait dĂ©peinte le philosophe initiateur. Celui-ci le maudit pour sa faiblesse, avant de le condamner Ă  se mĂ©tamorphoser en serpent et Ă  ramper jusqu’à ce qu’une femme fidĂšle lui rende sa premiĂšre forme2 ». 3 Sur les enjeux de cette initiation refusĂ©e, je renvoie Ă  Y. Citton, Inspiration et renoncement da ... 4Lamekis-serpent retrouve alors son compagnon SinoĂŒis transformĂ© lui-mĂȘme en hibou, tous deux parviennent Ă  rejoindre l’innocente Clemelis Ă  la cour de Motacoa, et aprĂšs quelques derniers retournements, ils reprennent leur forme humaine. Lamekis parvient Ă  dĂ©voiler les ruses du fourbe Zelimon, dont les mensonges avaient suscitĂ© son injuste jalousie envers sa fidĂšle Ă©pouse, il rentre dans les faveurs du roi, obtient la punition de Zelimon transformĂ© Ă  son tour en hibou et finira sa vie en bon gouvernant ». Le philosophe Dehahal rĂ©apparaĂźt toutefois pour prĂ©ciser qu’il n’accordera pas l’immortalitĂ© Ă  Lamekis parce que celui-ci n’a pas su rĂ©sister Ă  son dĂ©sir de vengeance et n’a pas demandĂ© au roi la grĂące de Zelimon, alors qu’ il y a plus de gloire Ă  pardonner qu’à punir » VIII, 156. Ici aussi, toutefois, loin de regretter un choix qui l’empĂȘche de s’élever au statut supĂ©rieur du philosophe, Lamekis paraĂźt plutĂŽt se fĂ©liciter de son choix malgrĂ© l’avis de Dehahal, je persistai dans mon ressentiment, je m’en rĂ©jouis dans le secret de mon cƓur, et je dĂ©cidai que si le Ciel me laissait maĂźtre du sort de ce traĂźtre, il ne reprendrait jamais sa premiĂšre forme3 » VIII, 157. 5Au sein de ce premier niveau narratif, Lamekis apparaĂźt donc comme un personnage qui rĂ©siste obstinĂ©ment au devenir-esprit-philosophe que faisait miroiter le rĂ©cit Ă  travers les Ă©pisodes situĂ©s dans l’üle des Sylphides. Cette obstination rejoint l’invraisemblable entĂȘtement dont il fait preuve dans sa jalousie envers une Ă©pouse que tous les indices tendaient Ă  innocenter. Une telle constance dans la jalousie ou dans la soif de vengeance est d’autant plus frappante qu’elle intervient dans un univers oĂč tout se voit chamboulĂ© Ă  chaque instant par les Ă©vĂ©nements les plus imprĂ©visibles et les plus cataclysmiques. Le roman de Mouhy s’inscrit encore dans une Ă©poque oĂč le romanesque est synonyme d’invraisemblances choquantes, d’outrances stylistiques et de renversements constants, qui nous lassent vite que parce que leur radicale imprĂ©dictibilitĂ© nous apparaĂźt elle-mĂȘme comme conventionnelle et attendue. 6Autour de cette intrigue relativement simple — Lamekis retrouve son Ă©pouse aprĂšs un dĂ©tour par l’üle des Sylphides qui l’a transformĂ© en serpent — se greffent en effet de trop nombreux rĂ©cits annexes et enchĂąssĂ©s retraçant les annĂ©es antĂ©rieures de la vie du protagoniste ainsi que l’histoire du roi Motacoa et de son Ă©pouse, NasilaĂ©. Le roman dans son ensemble a l’allure d’une tempĂȘte sans fin, au sein de laquelle les personnages et le lecteur se voient ballottĂ©s d’un monde Ă  l’autre, d’une pĂ©riode Ă  l’autre, de catastrophes en catastrophes, de tromperies en traitrises, et d’illusions en hallucinations. Dans les mƓurs bizarres des peuples visitĂ©s, dans les multiples monstres rencontrĂ©s en chemin, dans la soudainetĂ© des retournements de situation, tout est fait pour exacerber des effets de surprise et d’étonnement, dont l’effet se tarit toutefois par leur multiplication mĂȘme. 7On voit ainsi le pĂšre de Lamekis se faire persĂ©cuter par la reine SĂ©miramis, dans une guerre qui met aux prises un pouvoir religieux cachĂ© dans des souterrains et un pouvoir politique l’attaquant depuis la surface ; on voit le roi Motacoa devoir affronter, Ă©galement dans les souterrains de la terre intĂ©rieure » annoncĂ©e par le titre, un royaume d’hommes-vers, puis d’hommes-crapauds, qu’il vainc grĂące Ă  son fidĂšle chien Falbao ; on voit Lamekis lui-mĂȘme se faire recueillir dans un nid d’aigles gĂ©ants, par lequel il se fait adopter et dont il parvient Ă  dompter l’aiglon devenu orphelin, aiglon qu’il chevauche pour aller venger la mort de son pĂšre en abattant le pouvoir de SĂ©miramis. 4 Sermain, MĂ©tafictions 1670-1730. La rĂ©flexivitĂ© dans la littĂ©rature d’imagination, Paris, C ... 5 En rapprochant l’écriture de Mouhy du procĂ©dĂ© de l’anamorphose productrice de distorsions, de disc ... 8L’impression gĂ©nĂ©rale qu’en retire le lecteur moderne est celle d’ĂȘtre immergĂ© dans un univers chaotique, parfaitement imprĂ©visible, sur lequel on n’a donc aucune maĂźtrise et que l’on subit sur le mode du cauchemar. ConformĂ©ment au dispositif mĂ©ta-fictionnel brillamment analysĂ© par Jean-Paul Sermain4, le problĂšme de la croyance Ă  cet univers parfaitement invraisemblable est thĂ©orisĂ© par le roman lui-mĂȘme. Les protagonistes se demandent souvent s’ils sont en train de rĂȘver ou s’ils sont Ă©veillĂ©s, le rĂ©cit Ă©voluant selon des alternances simples entre horreurs et Ă©vanouissements, espoirs trompeurs et cruelles dĂ©convenues, rĂ©voltes et rĂ©signations, selon une dynamique qu’Emmanuelle SempĂšre a judicieusement situĂ©e Ă  la charniĂšre du merveilleux et du fantastique, dĂ©jouant toute frontiĂšre stable entre ce qui relĂšve de la conviction, de l’empathie, de la crĂ©dulitĂ© et de l’incrĂ©dulitĂ©. La complaisance avec laquelle Mouhy reprĂ©sente, dĂ©taille et rĂ©pĂšte des scĂšnes d’humiliation et de supplice contribue sans doute grandement Ă  cette impression d’inconfort et de malaise ; le choix des noms propres bizarroĂŻdes et radicalement non-intuitifs qu’il attribue Ă  ses personnages et dont il modifie souvent la graphie d’un volume Ă  l’autre du roman achĂšve de plonger le lecteur dans le dĂ©sarroi que cause la perte de tout repĂšre5. Comment croire Ă  quoi que ce soit, dĂšs lors que tout est fait pour saper les certitudes Ă  partir desquelles nous essayons de sĂ©parer la vĂ©ritĂ© de l’illusion ? C’est l’une des questions que met en scĂšne ce roman aussi fascinant que dĂ©routant. Puissance des apparences 6 Sur cette scĂ©nographie sylphique, voir, entre autres, M. Delon, Introduction » Ă  Sylphes et sylph ... 7 Voir sur cette question la belle analyse de M. Bokobza Kahan, Intrusions d’auteur et ingĂ©rences d ... 9Je laisserai de cĂŽtĂ© l’aspect Ă  mes yeux le plus intĂ©ressant de ce roman — la mise en scĂšne des intelligences » sous la figure de Sylphes6 — pour me concentrer ici sur la façon dont, Ă  travers ses diffĂ©rents niveaux narratifs, le texte nous invite Ă  problĂ©matiser la croyance d’une façon qui rĂ©sonne intimement avec ce que peuvent redĂ©couvrir nos sciences sociales contemporaines. Sans avoir assez de temps pour mettre en place les subtilitĂ©s du cadre Ă©nonciatif Ă©minemment rĂ©flexif dĂ©ployĂ© par Mouhy7, je vais sĂ©lectionner quelques Ă©pisodes et citations qui prĂ©sentent Ă  mes yeux l’intĂ©rĂȘt majeur de reconfigurer les paramĂštres Ă  l’aide desquels nous jugeons les phĂ©nomĂšnes de croyance d’illusion, de naĂŻvetĂ©, d’apparence, de vĂ©ritĂ©, etc.. 10Je commencerai par un passage oĂč le philosophe Dehahal dĂ©clare Ă  Lamekis vouloir rapporter [s]on histoire afin qu’elle serve d’exemple », ce qui suscite une note de l’auteur qui noue intimement les ordres narratifs, moraux et politiques Dehahal donne une grande leçon dans ce Passage Ă  ceux que le ministĂšre charge de la conduite des autres hommes, en leur faisant connoĂźtre que le bon exemple est le plus fort de tous les moyens dont on peut se servir pour les corriger & pour les amener Ă  la perfection. IV, 88 8 Voir sur ce point le bel ouvrage de T. Hampton, Writing from History. The Rhetoric of Exemplarity i ... On retrouve ici des traces du paradigme de l’exemplaritĂ© qui a jouĂ© un rĂŽle si important dans la littĂ©rature de la Renaissance8 et qui se voit, bien entendu, surimposĂ© ici de plusieurs couches d’ironie et d’auto-parodie. La puissance de moralisation contenue dans un rĂ©cit dĂ©pendra de la perception de son exemplaritĂ©, laquelle ne sera pas directement liĂ©e Ă  l’existence historique des personnages mis en scĂšne. De mĂȘme qu’une fable animale peut vĂ©hiculer une morale Ă©difiante indĂ©pendamment de son irrĂ©alisme de surface, de mĂȘme un rĂ©cit fictionnel peut-il contribuer Ă  corriger » les hommes et Ă  les amener Ă  la perfection ». En d’autres termes on peut ne pas croire Ă  la rĂ©alitĂ© d’une fable, et nĂ©anmoins croire Ă  la leçon morale que son intrigue illustre. 11Cette grande leçon » de politique ne se contente pas de renverser les rapports de pouvoir entre le Prince et le PoĂšte. Elle met surtout en lumiĂšre tout ce que le pouvoir politique doit Ă  la sphĂšre du spectacle qui, au fil des rĂ©cits qu’elle met en circulation, fraie les sensibilitĂ©s morales des citoyens, oriente leurs aspirations, stimule sĂ©lectivement leurs indignations et sculpte leurs espoirs. Les fables que nous lisons configurent nos repĂ©rages existentiels en termes de justice et d’injustice Ă  chaque fois qu’elles tracent et retracent un cheminement narratif entre les difficultĂ©s de la vertu et les Ă©cueils du vice. 12Une fiction perçue comme exemplaire par un certain public fonctionne comme un attracteur de rĂ©alitĂ© indĂ©pendamment de son irrĂ©alitĂ© originelle, elle pourra faire advenir dans la rĂ©alitĂ© des types de comportements qui en Ă©taient auparavant exclus. S’il faut un pouvoir institutionnel d’ordre politique pour inscrire un sujet dans un rĂ©seau de communication oĂč il puisse ĂȘtre reconnu comme tel, il faut Ă©galement des rĂ©cits toujours plus ou moins fictifs pour permettre aux institutions sociopolitiques de prendre forme et rĂ©alitĂ© au sein d’une multitude. Il n’y a pas ici crĂ©ation ex nihilo, mais un processus de concrescence susceptible parfois d’accĂ©lĂ©rations dramatiques qui accumule, approfondit, surimpose, redirige des frayages successifs qui en arrivent progressivement Ă  pouvoir canaliser les sensibilitĂ©s et les affects. 13Faire d’un tel processus de concrescence le principe mĂȘme du pouvoir constituant par lequel s’expliquent l’émergence et l’évolution de nos institutions sociales, et considĂ©rer l’exemplaritĂ© narrative comme le grain de sable autour duquel prennent forme et rĂ©alitĂ© les trĂšs imparfaites perles institutionnelles qui organisent nos sociĂ©tĂ©s, cela contribue Ă  reconfigurer dramatiquement la notion d’autoritĂ©. Celle-ci ne repose plus seulement dans Celui qui, du Haut, valide l’existence sociale des sujets en formation au-dessous de Lui. Elle relĂšve bien plutĂŽt d’une circulation de validitĂ© et de recevabilitĂ©, ou encore d’une autorisation circulaire qui se dĂ©roule bien plus horizontalement que verticalement, entre des esprits qui valent autant par leur masse que par leur statut plus ou moins privilĂ©giĂ©. Dans la sphĂšre des esprits, le Pouvoir se prĂ©sente moins comme un pouvoir-agir que comme un pouvoir-d’ĂȘtre-cru. C’est ce que met assez suggestivement en scĂšne un double Ă©pisode qui fait le corps de la troisiĂšme partie de Lamekis. 14Au sein d’un niveau narratif consacrĂ© aux aventures souterraines de Motacoa le pĂšre adoptif de Lamekis, une sĂ©rie de monstres bizarres et hybrides attaquent le hĂ©ros ainsi que son fidĂšle chien Falbao. Alors que la force physique supĂ©rieure de Falbao suffit Ă  dĂ©faire les hommes-vers, quelque chose d’ extraordinaire » se passe au cours de l’affrontement avec les hommes-crapauds au lieu que les combats se jouent Ă  coups de poings, d’épĂ©es ou de morsures, c’est soudainement un charme inconnu » qui paralyse l’invincible chien dĂšs lors qu’un simple Ă©tendard de la Chouette » captive ses regards ce vil aspect lui paroissoit redoutable, intimidoit ses regards », au point de neutraliser complĂštement sa force de combat et de rĂ©sistance. EncerclĂ© d’ennemis et privĂ© de son plus vaillant adjuvant, Motacoa se croit perdu lorsqu’il s’aperçoit ĂȘtre lui-mĂȘme porteur d’un heureux ascendant » la fureur qui parut dans mes yeux, ou pour mieux dire, leur charme secret, causa un effroi si subit & si prodigieux Ă  cette foule acharnĂ©e Ă  ma perte qu’elle disparut une seconde fois en jetant des hurlemens affreux » III, 15-19. Les mĂȘmes prodiges se reproduisant Ă  plusieurs reprises, le hĂ©ros en dĂ©duit que les aspects ont une puissance propre sur les individus — un charme — de par les impressions qu’ils font sur leur esprit, et il comprend du mĂȘme coup que c’est moins par sa vigueur physique que par un enchantement similaire que Falbao Ă©tait parvenu Ă  dĂ©faire ses ennemis prĂ©cĂ©dents les Tumpingands En examinant les choses avec prĂ©cision, je ne pus m’empĂȘcher de croire que je portois dans mes yeux l’assurance de ma victoire, & que leur aspect donnoit des coups assurĂ©s Ă  l’ennemi qui fuyoit. [
] L’aspect de cet hideux Oiseau Ă©toit pour [Falbao] ce que le sien avoit Ă©tĂ© aux Tumpingands, & je n’eus pas lieu bientĂŽt de douter que le mien ne portĂąt sur nos ennemis prĂ©sens toute la force de ses meurtiers ascendans. [
] Sans des exemples journaliers de l’effet de ces antipathies, ne donneroit-on pas Ă  ces vĂ©ritĂ©s le nom de fictions ? III, 19, 23 et 25 On a donc ici l’exemple d’une fiction qui rencontre la rĂ©alitĂ© en y produisant des effets bien rĂ©els. Que la simple vue d’une Chouette, rĂ©ellement inoffensive, puisse rĂ©ellement terrasser un molosse cent fois plus fort qu’elle, voilĂ  non seulement qui paraĂźt relever de la fiction, mais voilĂ  aussi qui souligne la puissance de la fiction, dĂšs lors qu’il suffit de peindre une chouette sur un Ă©tendard ou de feindre un regard furieux pour obtenir les mĂȘmes effets dans la rĂ©alitĂ©. 15À travers cette scĂšne de combat symbolique », Motacoa dĂ©couvre simultanĂ©ment trois choses 1o le simple aspect d’un ĂȘtre l’apparence qu’il projette contient une force propre d’impression immatĂ©rielle qui n’est nullement rĂ©ductible Ă  sa force physique matĂ©rielle, selon l’exemple lĂ©gendaire de la MĂ©duse ou du serpent Basilic invoquĂ© Ă  propos de Falbao ; 2o on peut dĂ©truire ou produire ces objets particuliers dont l’aspect exerce un charme, un ascendant prodigieux, sur nos ennemis ou sur nos alliĂ©s ; 3o l’effectivitĂ© de tels charmes est d’ordre relationnel, puisqu’elle ne rĂ©side pas tant dans leur force interne que dans un certain pathos une certaine sensibilitĂ© et rĂ©ceptivitĂ© propre Ă  ceux auxquels on a affaire, de telle sorte que l’efficience de ces antipathies ou de ces sympathies doit ĂȘtre localisĂ©e entre celui qui voit et ce qui est vu plutĂŽt que dans l’un ou l’autre de ces pĂŽles. 16Cent Tumpingands disposent de la force matĂ©rielle pour Ă©craser un chien, quelle que soit sa bravoure ; Falbao dispose de la force matĂ©rielle nĂ©cessaire Ă  transformer en pĂątĂ©e un ou deux hommes-crapauds porteurs de drapeau. On ne comprend ce qui dĂ©cide de l’issue rĂ©elle de tels affrontements qu’en prenant en compte quelque chose d’autre que la force matĂ©rielle un effet de l’aspect des choses parfaitement disproportionnĂ© avec leur constitution matĂ©rielle objective. En continuitĂ© avec les longs chapitres dĂ©diĂ©s par le roman Ă  l’üle des Sylphides — lieu propre des intelligences et des esprits — je dirai qu’il faut se placer sur le plan de l’esprit dĂšs lors que l’effet de l’impression ne s’explique plus seulement par la quantitĂ© ou par la qualitĂ© matĂ©rielles de la pression exercĂ©e, mais par une certaine disproportion entre le mouvement reçu et la rĂ©action causĂ©e — disproportion qui dĂ©finit une rĂ©ceptivitĂ© subjective particuliĂšre. Puissance de la multitude 9 Cette dimension politique de Lamekis paraĂźt constitutive de son dĂ©cor Ă©gyptien, s’il faut en croire ... 17MalgrĂ© ses allures monstrueusement chaotiques, le roman de Mouhy enchaĂźne trĂšs logiquement sur cette dĂ©couverte de la puissance des apparences deux Ă©pisodes consacrĂ©s aux formes les plus frappantes, ainsi que les plus importantes, de cette disproportion entre les causes matĂ©rielles et les effets spirituels l’expĂ©rience amoureuse et les conflits politiques9. AprĂšs avoir dĂ©couvert pour la premiĂšre fois les impressions que fait l’aspect d’une femme aimĂ©e, en l’occurrence la princesse NasilaĂ©, Motacoa Ă©coute celle-ci raconter l’histoire de sa vie, dont l’évĂ©nement principal tourne autour d’un effort politique de transformation lĂ©gislative. 18Tout part d’un pathos Ă©prouvĂ© par NasilaĂ© une antipathie effroĂŻable pour la pratique de deux Loix qui rĂ©pugnoient entiĂšrement Ă  [s]a façon de penser » III, 39. Les lois en question lui interdisaient de voir son pĂšre et lui enjoignaient de choisir un mari parmi de vils prĂ©tendants ». La princesse rĂ©ussit Ă  faire que son pĂšre, le bon Indiagar, roi des AmphiclĂ©ocles, circonscrive la premiĂšre loi et lui accorde une entrevue secrĂšte. Malheureusement la Grand’-PrĂȘtresse, la fourbe Lea-Minska, a vent de cette transgression et, au nom de la dĂ©fense des traditions reçues, exige que NasilaĂ© soit exĂ©cutĂ©e et son pĂšre dĂ©trĂŽnĂ© en punition de leur crime. S’ensuit un long conflit politique entre, d’une part, la Grand’-PrĂȘtresse qui se sert des superstitions pour manipuler le peuple et, d’autre part, un roi Ă©clairĂ© auquel la raison a enseignĂ© Ă  distinguer dans le nombre des Loix imposĂ©es, celles qui sont Ă©manĂ©es de la sagesse divine d’avec celles qui sont enfantĂ©es par la politique de ses ministres » III, 55. On retrouve ici en apparence le grand rĂ©cit stĂ©rĂ©otypĂ© des LumiĂšres raison critique contre illusions superstitieuses, rĂ©formisme progressiste contre traditionalisme passĂ©iste, bon prince Ă©clairĂ© contre prĂȘtres et ministres corrompus. 19L’intĂ©rĂȘt et l’originalitĂ© de l’épisode tiennent cependant au statut central que jouent les manipulations du regard dans la captation des croyances de la multitude. Toute cette description des conflits politiques est en effet fondĂ©e sur un double renversement. D’une part, ce qui rĂšgne chez les AmphiclĂ©ocles, ce n’est ni un roi, ni une Grand’-PrĂȘtresse, mais les opinions de la multitude. Au sommet de son intensitĂ©, le conflit entre les deux rivaux reprĂ©sentants du pouvoir monarchique et du pouvoir thĂ©ologique se rĂ©sout dans une scĂšne qui tient dĂ©jĂ  du sondage ou du rĂ©fĂ©rendum comme vote de confiance. Les deux prĂ©tendants au pouvoir sont mis sur une machine en forme de balance, et ce sont les inclinations des spectateurs qui feront pencher la victoire dans l’un ou l’autre camp La Grand’-PrĂȘtresse avoit la supĂ©rioritĂ© du thrĂŽne parce qu’elle reprĂ©sentoit le Dieu des AmphiclĂ©ocles ; mais de la Grande Tribune, l’Indiagar se trouvoit son Ă©gal, & le peuple seul pouvoit faire tomber la balance du cĂŽtĂ© que son inclination lui dictoit. III, 88 20Un texte de loi lu ultĂ©rieurement pour vider la querelle prĂ©cisera lui aussi qu’il appartient au peuple assemblĂ© de porter un jugement dĂ©finitif » III, 102. DĂšs lors que la dĂ©cision ultime, le jugement dĂ©finitif », vient du public des spectateurs, et plus prĂ©cisĂ©ment de ses inclinations », qui font tomber la balance de l’autoritĂ© du cĂŽtĂ© qui lui plaira, c’est au bon plaisir de la multitude qu’est suspendu le pouvoir politique. 21Le rĂ©cit nous fait aborder un imaginaire politique qui remonte Ă  La BoĂ©tie ou Ă  Marsile de Padoue, et qui — Ă  travers Spinoza — situe la source du pouvoir politique dans la puissance de la multitude » multitudinis potentia, que les institutions Ă©tatiques aussi bien que religieuses ne font que capter, gĂ©nĂ©ralement pour la dĂ©tourner au profit de leurs dirigeants. Au sein de cet imaginaire qui ne reprĂ©sente plus le pouvoir comme venant du Haut pour s’abattre sur le peuple, mais qui le fait Ă©maner d’une puissance Ă  situer au sein de la basse multitude elle-mĂȘme, l’épisode du conflit entre Indiagar et la Grand’-PrĂȘtresse illustre de façon proprement exemplaire les stratĂ©gies de captation et de gestion des affects communs, des flux de croyances et de dĂ©sirs qui constituent la substance mĂȘme de la politique du point de vue de cette tradition philosophique. 22Face Ă  une opposante qui est parvenue Ă  susciter un mouvement d’indignation au sein du peuple, le roi ne peut d’abord que cĂ©der Ă  la rumeur publique » III, 56. MĂȘme lorsqu’il cherche Ă  ĂȘtre un prince Ă©clairĂ© — et Ă©clairant un Enlightener, un AufklĂ€rer — il ne doit jamais oublier que, contrairement Ă  un sujet ordinaire », qui peut se contenter de jouir de lui-mĂȘme » et de se laisser conduire par la raison », le dĂ©tenteur du pouvoir politique est condamnĂ© Ă  ĂȘtre l’esclave des apparences », des prĂ©jugĂ©s », voire des frĂ©nĂ©sies » de la multitude Cent fois, dans le dessein d’ouvrir les yeux Ă  un peuple aveugle, j’ai tĂąchĂ© d’appuyer de si saintes vues du crĂ©dit de ceux qui ont droit d’entraĂźner leur suffrage ; mais tel est l’entĂȘtement, ĂŽ Princesse, de ceux mĂȘme qu’une Ă©ducation Ă©levĂ©e doit Ă©clairer, le prĂ©jugĂ© domine, la faiblesse du vulgaire a consacrĂ© ces fastueux usages ! en vain la raison veut-elle percer cette ignorante obscuritĂ©, il semble que l’on se plaise dans ces tĂ©nĂšbres & qu’on rougiroit de voir dissiper des nuages dont l’orgueil, l’indolence & la mollesse sont les principes. III, 64 23DerriĂšre les anciens topoi du mĂ©pris condescendant des Ă©lites » Ă©clairĂ©es envers l’indĂ©crottable ignorance des masses », cet Ă©pisode de Lamekis fait apparaĂźtre Ă  la fois une trĂšs intĂ©ressante acceptation de la force effective des croyances populaires et une suggestive attitude de stratĂ©gisation possible des facteurs qui gouvernent les flux de croyances et de dĂ©sirs. DerriĂšre l’opposition binaire et rĂ©actionnaire entre les lumiĂšres de la raison et l’ignorante obscuritĂ© » oĂč se complaĂźt la faiblesse du vulgaire » orgueilleux, indolent et mou, Mouhy agence un discret retournement c’est chez ceux mĂȘme qu’une Ă©ducation Ă©levĂ©e doit Ă©clairer » que le prĂ©jugĂ© domine ». Plus subtilement et plus radicalement, les flux de croyances sont dĂ©crits comme ayant plus de force que les actes de souverainetĂ© il ne s’agit pas d’assujettir ceux qui pensent mal aux ordres de ceux qui ont l’autoritĂ© de leur commander, mais seulement d’appuyer une proposition de rĂ©forme sur le crĂ©dit de ceux qui ont droit d’entraĂźner leur suffrage ». La formule est frappante le droit » ne vaut pas comme une source de pouvoir en soi Ă©manant d’une souverainetĂ© supĂ©rieure, mais seulement comme ce qui contribue Ă  asseoir et Ă  augmenter le crĂ©dit » la crĂ©dibilitĂ©, la recevabilitĂ© d’une action politique. On ne se situe pas ici dans un imaginaire de l’acte politique, mais dans un imaginaire de la circulation des flux de croyances, destinĂ©es Ă  entraĂźner, selon leur intensitĂ©, plus ou moins de suffrages. 24ConformĂ©ment Ă  l’allĂ©gorie sylphique, il n’est pas indiffĂ©rent que cet imaginaire convoque des mĂ©taphores aĂ©riennes et vaporeuses pour s’inventer une expression digne de lui. Le roi, qui vient d’expliquer Ă  sa fille que la raison Ă©tait incapable de dissiper les nuages » des illusions populaires, se dit confiant, quelques pages plus loin, que sa seule prĂ©sence alloit dissiper les nuages de la rĂ©bellion » III, 70. C’est en effet l’air qui, depuis l’épicurisme antique, est perçu comme l’élĂ©ment Ă  travers lequel agissent des formes d’ĂȘtres trĂšs subtils, auxquels LucrĂšce rĂ©servait le nom de simulacres. Comme dans les souterrains oĂč se battaient Motacoa et son chien Falbao, c’est Ă  travers une guerre des images que se rĂ©sout le conflit politique entre Indiagar et la Grand’-PrĂȘtresse. En plus de mettre en scĂšne l’imaginaire de la dĂ©mocratie radicale fondĂ©e sur la potentia multitudinis, cet Ă©pisode donne aussi une leçon de stratĂ©gie politique, au terme de laquelle la captation des affects repose sur des propriĂ©tĂ©s trĂšs particuliĂšres de l’utilisation du spectacle. Puissance du simulacre 25Au sein de la machine Ă  spectacle qui tranchera entre les deux prĂ©tendants au pouvoir politique, selon les inclinations et les suffrages de la multitude, c’est l’apparition de la figure du roi qui constitue le facteur de basculement du conflit, en suscitant une acclamation gĂ©nĂ©rale la majestĂ© du Roi dĂ©racina dans un instant la rĂ©bellion & grava dans les cƓurs les sentiments de respect & d’amour » III, 89. À l’inverse, c’est parce que la Grand’-PrĂȘtresse ne peut pas se prĂ©senter aux regards Ă  l’instant dĂ©cisif que sa cause est perdue il fut heureux que la Loi qui dĂ©fendoit au peuple de jetter les yeux sur elle eĂ»t lieu, cet aspect respectable Ă©toit capable de le toucher & de le porter une seconde fois Ă  la rĂ©volte » III, 105. 26Comme dans les combats souterrains de Motacoa, c’est le pouvoir propre de l’aspect qui est le nerf de la guerre en politique. On croit ce qu’on voit — mĂȘme si ce qu’on voit ne relĂšve que d’un spectacle d’apparences. Les images qui flottent Ă  travers les airs nous touchent et gravent en nous certains sentiments indignation, respect c’est de ces impressions que rĂ©sulte le maintien en place d’un pouvoir Ă©tabli ou la rĂ©ussite d’une rĂ©bellion. En une paronomase significative, Mouhy souligne que c’est l’aspect qui contient dans le respect » III, 85. La chose est Ă  entendre littĂ©ralement ce sont les images les aspects » qui capturent, canalisent et orientent contiennent » les flux molĂ©culaires de croyances et de dĂ©sirs respect » qui circulent au sein d’une sociĂ©tĂ© et qui animent sa vie spirituelle collective. 27Outre l’image corporelle du roi ou de la Grand’-PrĂȘtresse, ce sont bien entendu d’autres aspects qui peuvent produire des effets apparemment aussi magiques » c’est-Ă -dire disproportionnĂ©s Ă  leurs seules propriĂ©tĂ©s physiques. À cĂŽtĂ© de l’impression paralysante que peut causer un Ă©tendard de hibou sur l’intrĂ©pide Falbao, la scĂ©nographie politique rapportĂ©e par NasilaĂ© Ă©voque divers objets investis d’aussi extraordinaires » pouvoirs, dont une babouche et un Ki-argouh reprĂ©sentant une effigie du Roi ». Une note explicative prĂ©cise la nature de ces pouvoirs sur les sujets » auxquels il est prĂ©sentĂ© Ils avoient une telle vĂ©nĂ©ration pour l’aspect de ce signe, que lorsqu’il leur Ă©toit montrĂ©, ils fermoient les yeux, comme se reconnaissant indignes de voir en face cette Effigie sacrĂ©e. » III, 78 28On mesure le paradoxe visuel dont se nourrit ce type d’objet, pour lequel le rĂ©cit rĂ©servera le terme de simulacre on ne peut le voir qu’en fermant les yeux, et pourtant il faut l’avoir vu pour savoir/sentir qu’il faut fermer les yeux devant l’interdit de regard dont il est porteur. Le simulacre illustre le pouvoir propre d’une image qui s’impose avec la plus grande force dont puisse disposer une image en mĂȘme temps qu’elle s’abolit comme image. Si l’on essaie de reconstituer la hiĂ©rarchie des puissances qui structure le monde dĂ©peint au sein de Lamekis, on s’aperçoit que ce ne sont pas les rois qui dominent les populations, mais les simulacres. Une autre note Ă©rudite prĂ©cise en effet que le Roi paroissait devant le Simulacre avec les mĂȘmes cĂ©rĂ©monies que ses Sujets observoient devant lui » III, 90. Les princes de ce monde sont soumis au pouvoir des simulacres, de la mĂȘme façon que les sujets sont soumis aux princes. 29Une autre figuration suggestive du simulacre est proposĂ©e dans le mĂȘme Ă©pisode Ă  travers l’image du plus sacrĂ© ouvrage des AmphiclĂ©ocles, le Livre d’airain. Comme de juste, il reprĂ©sente lui aussi un dĂ©fi au regard lorsqu’on ouvroit le Livre des Loix, le privilĂšge des yeux cessoit & le peuple Ă©toit obligĂ© de lui tourner le dos comme au Simulacre » III, 96. Le Kafka de Vor dem Gesetz n’a pas rĂȘvĂ© pire le livre des Lois ne peut s’ouvrir qu’avec les yeux fermĂ©s. Or les rares privilĂ©giĂ©s qui ont l’autorisation de lire ce Livre d’airain y dĂ©couvrent un texte » des plus dĂ©routants il n’étoit rempli que de points et de virgules, & c’étoit la maniĂšre dont ces caractĂšres Ă©toient disposĂ©s qui signifioit les mots » III, 80. Si l’on se souvient que les marques de ponctuation ont pour fonction de scander les flux de paroles, en indiquant les moments de pause et de respiration qu’il faut y insĂ©rer, on verra un autre paradoxe pragmatique dans la note Ă©rudite qui suit immĂ©diatement cette description du Livre lorsque le Souverain des AmphiclĂ©ocles permettoit Ă  un de ses sujets de respirer, c’étoit lui commander de mourir » III, 80
 Tuer quelqu’un en lui enjoignant de respirer est aussi difficile que lire un livre les yeux fermĂ©s. C’est dans le monde d’Orwell qu’on est cette fois plongĂ© le regard, c’est la cĂ©citĂ© ; la respiration, c’est la mort ; le Souverain, c’est le peuple ; la paix, c’est la guerre. 30On est bien ici au cƓur des antipathies qui paraissent relever de la plus extraordinaire fiction, mais que le narrateur nous invite Ă  ramener Ă  des exemples quotidiens ». Or une autre note savante nous apprend que les AmphiclĂ©ocles disposaient d’une procĂ©dure pour ne pas succomber Ă  de telles antipathies — procĂ©dure qui s’inscrit dans l’imaginaire sylphique des esprits Ă©lĂ©mentaires », que l’on peut contraindre Ă  rentrer dans leur tourbillon par la force de la grande PriĂšre » Ces Peuples Ă©toient persuadĂ©s que les atomes qu’ils respiroient Ă©toient autant d’esprits purs ou impurs selon le bien ou le mal qu’ils faisoient ; il Ă©toit encore de foi parmi eux que lorsque la quantitĂ© des impurs s’étoient emparĂ©e d’eux & en avoit chassĂ© les bons esprits, ils mouroient subitement, & qu’ils Ă©toient transformĂ©s en reptiles affreux et toujours malheureux. Leur ThĂ©ologie leur apprenoit Ă  se garantir contre cette horrible infortune en prononçant trois mots mystĂ©rieux, qu’ils appeloient par excellence la grande PriĂšre. III, 50 31Le jeu des apparences et des croyances qui en rĂ©sultent nous situe bien dans le monde des esprits ». Les simulacres et les aspects qui forcent le respect des membres d’une collectivitĂ© ne sont que des Ă©manations subtiles et aĂ©riennes des vapeurs, des esprits animaux — des influx neuronaux, dirait-on aujourd’hui en se croyant plus avancĂ©. Le Livre d’airain n’est fait que du souffle des marques de ponctuation. C’est en nous forçant Ă  respirer que le pouvoir souverain nous menace de mort et nous assujettit. Qu’est-ce donc que la grande PriĂšre, sinon le souffle de trois mots qui, en sortant de notre bouche, repousse les mauvais esprits d’autres mots nĂ©fastes ou malintentionnĂ©s ? Dans tous les cas, le merveilleux mis en scĂšne dans Lamekis nous aide Ă  percevoir les flux atomiques et molĂ©culaires qui nous pĂ©nĂštrent, nous influencent, nous traversent et nous agissent, qu’ils s’insinuent en nous Ă  travers la scansion de nos paupiĂšres ou qu’ils circulent en un va-et-vient rythmĂ© par notre respiration. 32J’espĂšre avoir fait sentir Ă  quel point la monstruositĂ© » apparente du roman de Mouhy recĂšle une force de suggestion et une densitĂ© signifiante bien propres Ă  nous couper le souffle. L’épisode des AmphiclĂ©ocles racontĂ© par NasilaĂ© conduit Mouhy Ă  engager son rĂ©cit dans un emballement vertigineux. L’appareil des notes Ă©rudites permet Ă  une imagination admirablement retorse de dĂ©fier l’intelligence du lecteur en mĂȘme temps qu’il donne Ă  l’auteur l’occasion de saper joyeusement toute prĂ©tention d’autoritĂ© et de vĂ©ridiction. Ces notes attribuĂ©es Ă  Scaliger, Strabon, M. de Thou ou Mme Dacier — voire Ă  un texte inĂ©dit d’Aristote lui-mĂȘme — tendent tout Ă  la fois Ă  incarner et Ă  dĂ©jouer par avance la critique ethnologique qui se met en place Ă  l’époque du cĂŽtĂ© des rĂ©cits de voyageurs. En dĂ©nonçant les superstitions » des AmphiclĂ©ocles Ă  partir d’une posture d’iconoclaste, l’éditeur adopte le discours du Moderne qui, du haut de sa certitude rationaliste triomphante, dĂ©nonce l’inanitĂ© des croyances primitives dont s’illusionnent les autres cultures. 10 Sur les rĂ©sonances entre l’imaginaire ethnographique et la littĂ©rature merveilleuse, voir les beaux ... 33Pour conclure cette rĂ©flexion sur la croyance dans Lamekis, il convient de situer ce roman dans un triple contexte historique, qui l’investit d’enjeux essentiels au repĂ©rage de la mise en scĂšne des esprits » dans la littĂ©rature et l’imaginaire du xviiie siĂšcle. Le premier Ă©lĂ©ment de contexte est justement fourni par la constitution du regard ethnologique qu’adoptent les EuropĂ©ens en rĂ©digeant leurs rĂ©cits de voyages rĂ©els ou imaginaires au contact d’autres cultures10. Or il se trouve qu’un des textes importants de cette littĂ©rature, quelque peu postĂ©rieur Ă  Lamekis, va inventer un mot qui s’efforce de dĂ©signer prĂ©cisĂ©ment le type d’efficience symbolique que Mouhy visait Ă  travers sa mise en scĂšne des simulacres. Et il se trouve que c’est Ă©galement en rĂ©fĂ©rence Ă  peine moins fantaisiste Ă  l’Égypte que se fera cet Ă©pinglage ethnologique du simulacre. 11 C. de Brosses, Du culte des dieux fĂ©tiches ou ParallĂšle de l’ancienne religion de l’Égypte avec la ... 12 C. de Brosses, Du culte des dieux fĂ©tiches, ouvr. citĂ©, p. 11 et 18-19. 34Dans son ouvrage intitulĂ© Du culte des dieux fĂ©tiches ou ParallĂšle de l’ancienne religion de l’Égypte avec la religion actuelle de Nigritie, le prĂ©sident Charles de Brosses crĂ©e le nĂ©ologisme fĂ©tiche », tirĂ© du portugais Fetisso », qu’il traduit par chose fĂ©e, enchantĂ©e, divine ou rendant des oracles » et qu’il fait remonter de façon contestĂ©e aujourd’hui Ă  la racine latine Fatum, Fanum, Fari 11 » ces FĂ©tiches divins ne sont autre chose que le premier objet matĂ©riel qu’il plait Ă  chaque nation ou Ă  chaque particulier de choisir et de faire consacrer en cĂ©rĂ©monie par ses PrĂȘtres », ce sont des choses douĂ©es d’une vertu divine, des oracles, des amulettes, & des talismans », que les NĂšgres », Ă  la suite des Égyptiens, regardent en gĂ©nĂ©ral comme tutĂ©laires pour les hommes & comme de puissans prĂ©servatifs contre toute sorte d’accidens12 ». 35L’avertissement Ă  la troisiĂšme partie de Lamekis avait dĂ©jĂ  parfaitement identifiĂ© les fonctions du fĂ©tiche » que le prĂ©sident de Brosses nommera vingt-cinq ans plus tard Je crois devoir encore assurer que cet Ouvrage porte avec lui le sacrĂ© talisman de la cabale la plus mystĂ©rieuse. Si mes lecteurs veulent bien s’en rapporter Ă  ma parole, ils ne sortiront jamais sans ce livre admirable ; il prĂ©serve de tous les maux, procure les aventures fortunĂ©es, Ă©loigne les Ă©vĂ©nemens bizarres & capricieux, donne de l’esprit Ă  ceux qui n’en ont pas. III, v À premiĂšre vue, l’auto-dĂ©rision dont fait preuve Mouhy paraĂźt l’aligner sur le rejet drastique opĂ©rĂ© par le prĂ©sident de Brosses quant Ă  toute rĂ©alitĂ© effective des fĂ©tiches. Ce qui sera attribuĂ© par l’ethnologue Ă  la stupiditĂ© brute » des NĂšgres, le romancier en joue comme d’une crĂ©dulitĂ© incroyable, que l’on peut pousser Ă  ses extrĂ©mitĂ©s pour en faire un objet de persiflage — promettant aux lectrices que tous leurs dĂ©sirs seront accomplis avant la fin de l’annĂ©e », pour autant qu’elles lisent le livre le neuviĂšme jour de mai Ă  trois heures aprĂšs minuit » III, vii. Il coĂ»te aussi peu de se moquer des femmes lectrices de romans que de mĂ©priser les NĂšgres fabricateurs de fĂ©tiches. 36Un deuxiĂšme Ă©lĂ©ment de contextualisation pourrait confirmer cette attitude commune, dĂšs lors qu’on repĂšre dans Lamekis des allusions discrĂštes mais suivies Ă  l’affaire des Convulsionnaires. Il n’est guĂšre difficile de reconnaĂźtre les miracles Ă  l’occasion desquels l’Esprit s’exprimait Ă  travers les inspirĂ©es du cimetiĂšre de Saint-MĂ©dard, derriĂšre la Grand’-PrĂȘtresse qui fronde le pouvoir monarchique d’Indiagar en prophĂ©tisant la ruine du Royaume et en se frappant la poitrine » au pied du Simulacre » [
] la force de son discours la conduisit bientĂŽt dans l’enthousiasme divin des foudroyans oracles ; tous ses traits changent, annoncent la convulsion ; ses yeux sortent furieux de sa tĂȘte & semblent verser des larmes de sang. III, 74 37Ces scĂšnes qui avaient dĂ©frayĂ© la chronique des annĂ©es 1730, et qui continueront Ă  hanter le siĂšcle Ă  travers les multiples relations » de guĂ©risons, de possessions et d’automutilations qui en seront faites jusqu’à la RĂ©volution, sont clairement Ă  situer Ă  l’arriĂšre-fond de l’imaginaire des esprits ». Elles se reconnaissent non seulement dans la confrontation politico-thĂ©ologique entre le roi et la prĂȘtresse, mais aussi en filigrane parodique des multiples scĂšnes d’inspiration, d’initiation, d’épreuve et de supplice de Dehahal que multiplie Mouhy dans Lamekis. 13 Sur les Convulsionnaires et le figurisme dans les milieux jansĂ©nistes, voir les ouvrages de C. Mair ... 38De Brosses suggĂšrera d’ailleurs que les Convulsionnaires partageaient les illusions des fĂ©tichistes, lorsqu’il fera du figurisme » la racine des superstitions qu’il dĂ©nonce13. Et c’est pour se moquer de tout figurisme que Mouhy — qui dĂ©die des centaines de pages Ă  peindre les merveilles de l’üle des Sylphides, des esprits immatĂ©riels qui l’habitent et des intelligences supĂ©rieures qui nous en parviennent — s’amuse Ă  rabaisser les souffles spirituels au statut malodorant de pet dans une note au rĂ©cit hautement mystique de Dehahal un Auteur moderne a dit fort agrĂ©ablement que lorsqu’un vent nous incommodoit, c’étoit un Sylphe que nous avions dans le corps, qui vouloit s’en Ă©chapper » IV, 106. C’est bien en iconoclaste radical que se comporte Mouhy dans ses notes, ses pĂ©ritextes et ses mises en scĂšne de la crĂ©ation littĂ©raire, puisqu’il s’ingĂ©nie Ă  casser toutes les images qu’il a produites lui-mĂȘme et qui ne courent dĂšs lors aucun risque de se transformer en idoles. Ne croire Ă  rien — ou du moins Ă  rien d’autre que les faits dĂ»ment Ă©tablis par des procĂ©dures empiriques et rationnelles — voilĂ  apparemment la position Ă  laquelle nous convie le roman, comme tant d’autres textes cĂ©lĂšbres des LumiĂšres encore en gestation en ces annĂ©es 1730. 39MalgrĂ© des analogies superficielles, la posture du romancier se distingue toutefois nettement de celle de l’ethnologue. En accomplissant le geste que Bruno Latour a identifiĂ© comme emblĂ©matique de l’attitude moderne, le second dĂ©nonce le fĂ©tichisme au nom d’un savoir qui vise Ă  dĂ©truire la croyance superstitieuse pour lui substituer la raison scientifique. Le geste accompli par Mouhy est beaucoup plus complexe et fondamentalement diffĂ©rent. On ne le comprend qu’en le resituant dans un troisiĂšme Ă©lĂ©ment de contexte, fourni par le dĂ©veloppement de genres littĂ©raires centrĂ©s autour du merveilleux. Il est bien clair de Mouhy ne croit pas que son roman porte avec lui le sacrĂ© talisman de la cabale la plus mystĂ©rieuse », qui assurera prospĂ©ritĂ© financiĂšre et sentimentale de son lecteur — pas plus que Perrault, Madame d’Aulnoy ou Hamilton ne croyaient » Ă  l’existence des fĂ©es ou que Galland ne croyait voir des gĂ©nies sortir des bouteilles. Les conventions propres de la littĂ©rature merveilleuse tendent toutefois Ă  dĂ©jouer simultanĂ©ment les croyances et les dĂ©nonciations des croyances — lorsque ces dĂ©nonciations se font au nom d’une vĂ©ritĂ© ou d’une rĂ©alitĂ© dont l’existence serait, elle, bien Ă©tablie. 40Alors qu’en bon moderne, le prĂ©sident de Brosses dĂ©nonce les fĂ©tiches Ă  partir d’une prĂ©somption de connaissance de certains faits bien Ă©tablis, la fiction merveilleuse jongle avec des fĂ©es et des sylphes dont la dynamique tend Ă  rĂ©cuser la distinction mĂȘme qu’établit le moderne entre faits et fĂ©tiches, entre objectivitĂ© et subjectivitĂ©, entre science et illusion, entre savoir et croyance. La sape de toute forme d’autoritĂ© dans les pĂ©ritextes, le dĂ©membrement de toute figure d’autorialitĂ© dans les reprĂ©sentations de l’écriture, la mise en scĂšne ridicule et outrĂ©e du geste mĂȘme de dĂ©nonciation de la croyance superstitieuse au sein des notes faussement savantes — tout cela dĂ©stabilise aussi bien le statut des faits que celui des fĂ©tiches. 14 B. Latour, Sur le culte moderne des dieux faitiches [1996], Paris, Les EmpĂȘcheurs de penser en rond ... 41Mieux encore deux siĂšcles et demi avant que Bruno Latour n’en invente le mot, Mouhy et avec lui toute une littĂ©rature merveilleuse de l’ñge classique met d’ores et dĂ©jĂ  au jour la dynamique de ce mixte indissociable de fĂ©tiches et de faits qu’est le faitiche — Ă  savoir une rĂ©alitĂ© qui est Ă  la fois fabriquĂ©e par des pratiques humaines comme le fĂ©tiche et nĂ©anmoins dotĂ©e d’une existence autonome indĂ©pendante de nos dĂ©sirs comme le fait scientifique, tout en mettant en Ɠuvre une efficience qui dĂ©passe notre puissance d’agir individuelle comme le fĂ©tiche encore. En analysant comment Pasteur dĂ©couvre, isole et fait apparaĂźtre l’existence des microbes avec ses pratiques de laboratoire, ou comment la physique atomique dĂ©couvre et gĂ©nĂšre une Ă©nergie nuclĂ©aire qui Ă©chappe Ă  son contrĂŽle de par l’intrication des pratiques de laboratoire dans le tissu des relations sociales et politiques, Bruno Latour nous invite Ă  voir non seulement que les faits acquiĂšrent leur autonomie parce qu’ils sont fabriquĂ©s, mais aussi que les fabrications relĂšvent d’une efficience qui outrepasse toujours la maĂźtrise de leurs fabricateurs. Prendre acte de ce que les faitiches sont la condition de notre puissance d’agir et d’argumenter implique de remettre en cause les dichotomies autour desquelles s’est constituĂ©e la modernitĂ© — entre l’objectif et le subjectif, la science et la croyance, la matiĂšre extĂ©rieure et l’esprit intĂ©rieur. Cela conduit Ă  mesurer Ă  la fois notre capacitĂ© humaine Ă  produire de l’ĂȘtre Ă  travers nos fictions, et notre incapacitĂ© Ă  contrĂŽler a priori ce que deviendront ces fabrications aprĂšs leur rĂ©alisation collective au sein d’une nature dont nous ne sommes qu’une partie. D’oĂč les vertus d’attention, de soin et de prudence Care, Caute ! qu’exige le maniement des faitiches, dĂšs lors qu’on reconnaĂźt leur efficience de faitiches14. L’indĂ©passable vĂ©ritĂ© du roman cabalistique 42C’est toute cette dynamique du faitiche qui s’esquisse Ă  travers les lignes apparemment erratiques de Lamekis. Tout autant que par les effets magiques » des aspects, des antipathies et des simulacres, Mouhy met en scĂšne cette dynamique des faitiches principalement Ă  travers ses rĂ©fĂ©rences Ă  la cabale. Sans aucunement croire » que son livre ait les vertus magiques d’un sacrĂ© talisman », Mouhy dĂ©crit trĂšs prĂ©cisĂ©ment le fonctionnement de cabales » qui ne manquent pas d’ĂȘtre bien rĂ©elles », malgrĂ© tous les nuages d’illusion qui les entourent. 43Dans l’épisode de la lutte entre le roi Indiagar et la Grand’-PrĂȘtresse, le terme de cabale » dĂ©signe la stratĂ©gie de spectacle politique Ă  travers laquelle on tente de renverser un rĂ©gime existant pour s’emparer du pouvoir. Cette stratĂ©gie consiste, on l’a vu, Ă  savoir se servir des images aspects, simulacres, fĂ©tiches qui captent les dĂ©sirs et les croyances de la multitude. Lorsqu’on peut dire d’un parti que sa cabale, ses intrigues semblent triompher » III, 56 , on reconnaĂźt qu’il a su jouer de fictions fabriquĂ©es pour s’emparer d’un certain pouvoir. C’est par le maniement efficace des faitiches que la cabale transforme quelque chose d’apparemment immatĂ©riel un rĂȘve, un espoir, une illusion, une vision, des paroles, les anglophones dĂ©signeraient ceci comme relevant du hot air en un pouvoir devenu objectif, qui est en capacitĂ© de faire circuler des flots de richesses, d’emprisonner des corps, voire de couper des tĂȘtes. 44En conformitĂ© avec une intuition qui traverse l’ensemble de Lamekis, le terme de cabale » est toutefois plus prĂ©cisĂ©ment sollicitĂ© pour dĂ©signer une certaine machination de rĂ©ceptivitĂ©. Lors du discours de rĂ©ception de Dahahal parmi les Sylphes, on entrevoit de la cabale » dans le fait que certains esprits chagrins se rĂ©crient sur quelques Ă©pithĂštes » IV, 101 on suspecte que leur Ă©coute n’a pas Ă©tĂ© bienveillante, mais conditionnĂ©e par quelque jalousie ou conspiration sous-jacente. Dans l’avertissement de la cinquiĂšme partie, c’est l’auteur du roman qui se sait devoir faire face Ă  une cabale ignorante & envieuse », prĂ©disposĂ©e Ă  le critiquer quoi qu’il Ă©crive, et contre laquelle il mobilise ses lecteurs, afin que ceux-ci publient ses louanges de façon prĂ©emptive V, v. L’écoute d’un discours, la lecture d’un roman ne relĂšvent jamais d’une rĂ©ception ouverte » vierge et inconditionnĂ©e elles sont toujours prĂ©disposĂ©es par une certaine orientation prĂ©alable. Et c’est prĂ©cisĂ©ment autour de ces formes conditionnĂ©es de rĂ©ceptivitĂ© que se jouent les luttes politiques et littĂ©raires. Il ne suffit pas, pour un discours politique ou pour un roman, de simplement dire » une vĂ©ritĂ© ou une fiction ce qui importe le plus, c’est de composer une cabale qui s’insinue dans la rĂ©ceptivitĂ© ambiante, pour la modifier de façon Ă  neutraliser les cabales ennemies prĂ©existantes. 45C’est l’avertissement Ă  la troisiĂšme partie de Lamekis qui dĂ©ploie la complexitĂ© de la guerre des cabales dont dĂ©pend la rĂ©ception d’un texte. L’auteur constate et dĂ©plore que dans un nombre de gens qui nous font l’honneur de nous lire, il s’en trouve qui passent leur vie Ă  faire des applications » III, ii, c’est-Ă -dire Ă  vouloir recevoir un rĂ©cit purement fictionnel, fait pour amuser » et porter Ă  la vertu », comme contenant des rĂ©fĂ©rences et des attaques cryptĂ©es, visant telles personnes ou tels Ă©vĂ©nements rĂ©els. Contre de tels soupçons, il dĂ©clare hautement aimer mieux ĂȘtre louĂ© par les endroits flatteurs de la simplicitĂ© que de [s]e faire un nom dans des cabales odieuses » III, iii. Or c’est prĂ©cisĂ©ment dans ce troisiĂšme volume qu’il s’étend avec complaisance sur la description des cabales de la Grand’-PrĂȘtresse, dont les convulsions » pouvaient difficilement ne pas Ă©voquer, pour les contemporains, les dĂ©bats gĂ©nĂ©rĂ©s autour des JansĂ©nistes convulsionnaires, perçus comme dĂ©fiant le pouvoir royal. Et c’est Ă©galement dans ce mĂȘme avertissement que l’auteur prĂ©sentera son ouvrage, trois paragraphes plus loin, comme portant avec lui le sacrĂ© talisman de la cabale la plus mystĂ©rieuse »  46On voit que Lamekis mĂ©rite pleinement d’ĂȘtre rangĂ© au nombre des romans cabalistiques ». Le talisman propre Ă  sa cabale est en effet exemplaire d’un dispositif poĂ©tico-politique qui se situe au carrefour du regard ethnologique dĂ©nonciateur des fĂ©tiches, de la puissance des esprits mobilisĂ©e par l’épisode convulsionnaire et des propriĂ©tĂ©s du genre merveilleux. Loin de se rĂ©duire Ă  un pur jeu de dĂ©molition comme s’en contente la modernitĂ© iconoclaste envers les croyances primitives », la mise en scĂšne des esprits Ă©lĂ©mentaires par le rĂ©cit merveilleux dĂ©gage une positivitĂ© essentielle Ă  la constitution du monde humain. La fable extraordinaire imaginĂ©e par Mouhy permet Ă  la fois de nous faire prendre un certain recul par rapport aux rituels et aux simulacres qui conditionnent nos comportements sociaux selon les virtualitĂ©s du regard ethnologique, de nous faire mesurer la force spirituelle des courants collectifs de croyances et de dĂ©sirs qui agitent le corps des convulsionnaires et de donner, Ă  travers son roman merveilleux, l’exemple concret d’un simulacre qui se dĂ©nonce comme simulacre, sans pour autant perdre son efficience sur nos esprits. La poĂ©tique du merveilleux est en effet porteuse d’une leçon Ă©minemment politique en produisant des faitiches qui, parce qu’ils se prĂ©sentent explicitement comme des fĂ©tiches comme des fictions fabriquĂ©es, nous permettent d’agir Ă  la fois avec toute la puissance et avec toute la prudence dont relĂšvent les faitiches. InfosDiffusionsCastingRĂ©sumĂ©Chacun d'entre nous s'est dĂ©jĂ  retrouvĂ© au moins une fois, au coeur de la tourmente...Au nom de la vĂ©ritĂ© s'attache Ă  des hĂ©ros du quotidien en prise avec une dĂ©cision capitale. Chaque Ă©pisode est une tranche de vie dans laquelle chacun peut s'identifier ou projeter sa propre familleGenreSĂ©rie - ComĂ©die socialeAnnĂ©e de sortie2014Avec—Infos supplĂ©mentaires—Avis des internautes 1Vous avez aimĂ© ce programme ? Les jours se suivent et se ressemblent en cette deuxiĂšme pĂ©riode de confinement. AprĂšs avoir rĂ©trĂ©ci de moitiĂ© votre liste des films Ă  voir au moins une fois dans votre vie, fini les derniĂšres saisons d’ Elite » ou de The Walking Dead », vous ĂȘtes las de passer vos journĂ©es devant l’écran. Heureusement, il vous reste encore quelques options pour contrer l’ennui tout en peaufinant votre culture personnelle. 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AprĂšs l’avoir assassinĂ©e, Francisca Ă©pouse le mari de Laura, pĂšre de Clara, la fille de Laura. Francisca devient alors la nouvelle maĂźtresse de maison. Rien ne semble plus lui rĂ©sister. DĂ©terminĂ©e Ă  poursuivre sa quĂȘte de vengeance envers sa belle-soeur dĂ©cĂ©dĂ©e, elle reste fidĂšle Ă  ses idĂ©aux machiavĂ©liques. Par ailleurs, Clara, la fille, aime Manel, le jeune officier de police qui se rangera dans le camp de son ennemie. Clara est alors impliquĂ©e dans une affaire de vol alors qu’elle tentait de venir en aide Ă  son frĂšre. Manel n’a d’autre choix que de diligenter une enquĂȘte afin d’établir les responsabilitĂ©s. Francisca se satisfait des embrouilles judiciaires de Clara, sa niĂšce et fille adoptive et en profite pour donner le coup de grĂące Ă  son plan de vengeance. Sans que Francisca s’en doute, Clara dĂ©couvre que sa bellemĂšre projette d’assassiner son pĂšre afin de s’emparer de ses richesses. ApeurĂ©e et traumatisĂ©e, Clara tente de prĂ©venir son pĂšre, mais il n’en croit pas un mot et trouve insensĂ© de douter de la bonne foi de sa tendre Ă©pouse. Manipulatrice et persuasive, Francisca rĂ©ussit Ă  tromper la vigilance de tous, y compris celle de Manel, avec qui elle entretient une liaison amoureuse dans le but de l’éloigner de Clara. S’étant assurĂ©e que plus personne ne pourra entraver son chemin, Francesca assassine son mari et accapare tout l’hĂ©ritage familial. Seule Ă  connaitre l’auteur de toute cette horreur, Clara dĂ©cide de non seulement se battre pour faire Ă©clater la vĂ©ritĂ©, mais aussi de reconquĂ©rir Manel, son unique amour. Les photos Vos commentaires sur Au Nom de l'Amour Informations Titre original Amor MaiorNombre d'Ă©pisodes 107 Ă©pisodes de 52 minutes Pays d'origine Portugal1Ăšre diffusion sur IDF1 22 mars 2021 Diffusion Du lundi au vendredi Ă  13h 2 Ă©pisodes et Ă  22h20 2 Ă©pisodes, dĂšs le 11 juillet avec 1 Ă©pisodeRediffusion Tous les samedis Ă  16h 2 Ă©pisodes Casting Sara Matos, JosĂ© Fidalgo, InĂȘs Castel-Branco, RogĂ©rio Samora... Recherche dans les programmes ï»ż

au nom de la vérité machination amoureuse